Le terrain exploré fait partie du prolongement vers l’est de la zone des Alpes bergamasques que Cosijn et Jong ont commencé à mettre en carte en 1926 (fig. 1). Il comprend des parties du cristallin situé au nord de la „ligne orobique”, du paquet d’écaillés (série porphyrique, série Collio, Verrucano, partie du Servino) et du paquet charrié consistant en Muschelkalk et en Esino (Muschelkalk, Esino, Esino supérieur, Raibl inférieur, c. à. d. „Raibler Plattenkalk”). Le plancher du Muschelkalk et de l’Esino se trouve dans les couches du Servino qui servent de moyen de glissement. Ce Servino de la zone de charriage apparaît à la surface au nord et au nord-est du Passo San Simone. Le substratum des paquets sédimentaires consiste en la même substance que le cristallin charrié au nord sur ces paquets. Nous avons constaté la présence de trois chevauchements (les numéros I, II et III du diagramme), qu’il faut considérer comme des charriages dans la zone des racines des nappes alpines orientales supérieures, nés par suite de la continuation du sous-charriage de l’arrière-pays après la formation de ces nappes. Des paquets de sédiments glissés des lêvres méridionals de celles-ci furent entraînés passivement par ces chevauchements vers le sud et serrés ensuite partiellement. C’est ainsi qu’on rencontre actuellement des bandes de Verrucano et de Servino le long de la ligne d’affleurement du chevauchement des Laghi di Porcile. Le cristallin appartient aux schistes de Rendena et d’Edolo, et à l’exception des intrusions du granit porphyrique, il est probablement d’origine sédimentaire (paragneissique). La présence de schistes de Tonale n’a été constatée nulle part. Cette division du cristallin en schistes de Tonale, de Rendena, et d’Edolo remonte à Salomon (Lit. 17). Les schistes de Rendena sont identiques à notre „gneisgroep”, qui représente les „gneiss chiari” de Porro, les schistes d’Edolo à notre „fylliet en glimmerschistengroep”, qui représente les „micascisti a gneiss” de Porro. La série porphyrique, qui constitue le plus ancien élément du recouvrement sédimentaire, fit en partie fonction de substratum et prit part également à la formation des écailles. Celle-ci n’apparaît à la surface qu’à deux endroits, aux environs de Branzi et au nord de Porta, où elle contient des porphyrs et des porphyrites de même que des tufs volcaniques à cristaux, des tufs lapideux et vitreux d’une caractère porphyrique et porphyroïde. Sur les limites de ces effusifs et des couches de Collio se rencontrent des tuffites dits conglomératiques et psammitiques, riches en couches de tuf proprement dit. Ce sont ces couches-là qui ont donné lieu dans les lames du paquet d’écailles aux mouvements des sédiments de formation plus récente par rapport à la série porphyrique, mouvements qui expliquent la discordance entre les séries porphyrique et Collio. Cette série Collio se compose d’une série de grès contenant des couches de tuf et surmontée d’un paquet d’ardoise sous une couverture concordante de conglomérats et de sernifites de Verrucano qui s’y trouvent entremêlés. On constate dans les ardoises la présence de plusieurs horizons. Le Verrucano passe insensiblement par des grès mêlés de conglomérats très fins au Servino inférieur. Cosijn déjà, dans le Résumé de son ouvrage „De geologie van de Valli di Olmo al Brembo” (Lit. 2), a traité des zones différentes du Servino. Quand parfois la formation des écailles a été très intensive, le Servino entier a été soumis à ce procès. Le charriage du Muschelkalk et de l’Esino pourtant s’est produit toujours au moyen des ardoises et des marnes présentes dans le Servino moyen et supérieur. Le Servino supérieur passe insensiblement au Muschelkalk inférieur. Tout ce que Cosijn dans l’ouvrage susnommé a constaté au sujet du Muschelkalk et de l’Esino s’applique également aux calcaires du terrain décrit dans la présente étude, la part faite au Muschelkalk, dont la „faciès nord” seule s’est développée. Surtout au massif du Mont Pegherolo et du Mont Secco nous paraît-il que les zones 2 et 3 y contiennent moins de cement sableux et que les bancs calcaires y sont plus nombreux. Pour ce qui est du calcaire et de la dolomie d’Esino, il faut observer qu’ils ne contiennent guère des fossiles, exception faite des Diplopores, tandis que l’Esino supérieur, en tant que nous avons pu constater, y manque totalement de minerai. Dans le „Plattenkalk” de Raibl, qui forme au massif du Mont Pegherolo et du Mont Secco une couverture concordante avec l’Esino supérieur, on a pu constater la présence de fractures, qui très probablement se prolongent vers l’est en s’enfonçant considérablement, quoique l’état avancé de l’érosion les soustraie à l’observation. On peut les comparer aux failles en forme de cuiller étudiées par Cosijn. Leur formation remonte à la même cause que celle des failles qui séparent les lames dans le paquet d’écaillés. Des failles analogues se rencontrent dans le massif du Pic del Vescovo et du Mont Valgussera. Dans les paquets sédimentaires des Alpes bergamasques ont eu lieu des mouvements plus ou moins horizontaux dans la direction nord—sud le long de zones qui se prêtaient à servir de surface de glissement. La pression occasionnée par le sous-charriage de l’arrière-pays des nappes alpines orientales supérieures se fit sentir du nord. Dans les paquets de sédiments situés entre deux zones de glissement, des failles inverses se produisirent qui eurent pour effet une structure imbriquée dans les sédiments du Perm et du Trias inférieur, et une série de failles analogues dans les couches du Muschelkalk et de l’Esino. En conséquence de l’action exercée par le porphyr et le tuffite à la base des couches de Collio, le socle du paquet d’écailles ne forme pas un plan uni, par opposition à celui des couches du Muschelkalk et de l’Esino, qui se trouve dans le Servino. Il est probable qu’un socle pareil se trouve encore dans le Raibl moyen, le long duquel le chevauchement du „Hauptdolomit” s’est produit. On ne le rencontre plus au terrain étudié ici. Comme la série porphyrique a servi en partie de substratum et prenait part également à la formation d’écailles, il est légitime d’admettre entre ce porphyr et le socle une discordance, qui du reste a été indiquée ailleurs dans les Alpes bergamasques, tandis qu’il est fort bien possible que cette série porphyrique repose encore par endroits — par exemple dans le terrain porphyrique du Lugano — sur le sol primaire. Le substratum des sédiments présente des culminations et des dépressions. Cacciamali déjà a admis la présence d’une culmination dans la vallée de Foppolo, et il faut reconnaître le bien fondé de sa supposition. Cette culmination compliquée forme le prolongement vers l’est du grand bombement de Val Sassina, Ornica, Caprile et Mezzolda. Probablement le décrochement de Terzera a eu pour effet une dislocation dans la culmination de Mezzoldo par rapport à celle de Foppolo. Les lames dans le paquet d’écailles et les failles inverses dans le Muschelkalk et l’Esino ont été causés par une pression dans la direction nord—sud, qui tient au sous-charriage au moyen des culminations dans le socle des paquets de sédiments de l’arrière-pays. La présence de décrochements horizontaux, qui se bornent aux paquets sédimentaires situés entre deux planchers, s’explique par la résistance inégale que les parties diverses des différentes écailles rencontrent, donc en fin de compte également par la distribution des culminations. (Voir sur la carte les décrochements horizontaux de Maiocco, de Cava d’Ardesia, de Valleve-Branzi et la fracture dans la direction nord—sud près de Valleve). Pour le moment la structure tectonique des Alpes bergamasques se résumera donc comme suit. Il y a trois chevauchements dans le cristallin, zone des racines des nappes alpines orientales supérieures: 1°. Le chevauchement des Laghi di Porcile (I). 2°. Le chevauchement „gneiss chiari” (II). 3°. Le chevauchement „orobique” (III). Hors de la zone située entre le Passo di Verobbio et le décrochement de Terzera, et de la partie orientale du terrain exploré (Valle di Carisole, Valle Sambuzzo), la ligne d’affleurement du chevauchement orobique (chevauchement qui mit le cristallin sur les sédiments) a été partout prèsque entierement charriée par les chevauchements I et II. Aussi la frontière alpino-dinarique, c. à. d. la ligne d’affleurement du chevauchement orobique, ne monte-t-elle à la surface qu’aux endroits susmentionnés. Le chevauchement „gneiss chiari” entraîna sur sa crête des sédiments glissés en bas et les mit par endroits — probablement surtout à l’est — en contact immédiat avec les sédiments du paquet d’écaillés (Bte Fontanini, Monte Arete), tandis que le chevauchement „gneiss chiari”, comme il a été observé déjà, a été charrié à son tour par le chevauchement des Laghi di Porcile. Dans les paquets sédimentaires mentionnés plus haut se rencontrent dans la direction nord—sud des charriages plus ou moins horizontaux. Les planchers se trouvent dans le Servino, le Raibl et peut-être encore dans le Rhät, tandis que le paquet d’écailles manque de socle uni par suite de l’action excercée par la série porphyrique. Dans les sédiments situés entre deux planchers se sont produits des charriages et des décrochements horizontaux, qui tiennent à la présence de culminations dans le substratum. Les charriages dans les tuffites ont eu lieu dans les écailles mêmes. L’évolution de ces charriages dépendait de l’inclinaison des surfaces de charriage qui séparent les lames du paquet d’écailles. Il est admissible que les culminations du substratum n’étaient pas toutes achevées avant les plissements tertiaires.